Photo : ©Gabriel Delarageaz @delarageaz

Rédigé par : Patrick Hirling

PHOTOGRAPHIE • Tandis que la qualité des capteurs numériques ne cesse de s’améliorer et que même les smartphones rivalisent avec un appareil photo d’entrée de gamme, on assiste aujourd’hui à une renaissance de la photographie argentique, autant auprès de passionné·e·s qu’auprès du grand public.

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Rédigé par : Patrick Hirling

PHOTOGRAPHIE • Tandis que la qualité des capteurs numériques ne cesse de s’améliorer et que même les smartphones rivalisent avec un appareil photo d’entrée de gamme, on assiste aujourd’hui à une renaissance de la photographie argentique, autant auprès de passionné·e·s qu’auprès du grand public.

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PHOTOGRAPHIE • Tandis que la qualité des capteurs numériques ne cesse de s’améliorer et que même les smartphones rivalisent avec un appareil photo d’entrée de gamme, on assiste aujourd’hui à une renaissance de la photographie argentique, autant auprès de passionné·e·s qu’auprès du grand public.

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Pour l’Amour du Grain

Photo : ©Gabriel Delarageaz @delarageaz

Rédigé par : Patrick Hirling

PHOTOGRAPHIE • Tandis que la qualité des capteurs numériques ne cesse de s’améliorer et que même les smartphones rivalisent avec un appareil photo d’entrée de gamme, on assiste aujourd’hui à une renaissance de la photographie argentique, autant auprès de passionné·e·s qu’auprès du grand public.

La révolution digitale a affranchi nombre de formes d’art de leur dépendance d’un support matériel. Autrefois, chaque photographie existait comme négatif sur une pellicule, donc comme objet matériel qui implique un coût et nécessite un certain nombre de traitements. À l’inverse, une photo digitale est presque instantanée, n’a pas de coût réel et ne prend pas de place physique. Si l’on ajoute à cela que les capteurs numériques sont en principe capable d’égaler leurs ancêtres analogiques en termes purement techniques, il est surprenant que, tout comme les disques refont surface en musique, la pellicule et son grain semblent séduire une génération habituée à l’instantané.

Plus que de la simple nostalgie ?
Le phénomène n’est pas complètement récent. Depuis les années 2010, l’esthétique du film connaît un retour à la mode considérable. Il suffit de penser aux premiers filtres Instagram comme Nashville et Hudson ou aux applications simulant des imperfections et du grain comme Retrica. Vient ensuite la renaissance des polaroids avec les produits Instax de Fujifilm, puis des appareils dits « jetables » qui portent en eux une vraie pellicule 35mm. En parallèle, dans des milieux artistiques et en particulier dans la photographie de mode, l’argentique a su garder encore longtemps une place importante, considérée par beaucoup comme ayant des qualités visuelles propres et un savoir-faire associé méritant d’être conservés.

« L’argentique m’a permis de donner de la valeur à la photo que je vais prendre avant même de l’avoir prise »

« J’ai découvert la photo argentique autour de 2015, quand elle était presque à son point le plus bas », nous dit Gabriel Delarageaz, photographe de formation. « Si j’ai le choix, je fais de l’argentique simplement parce que j’aime le rendu. J’aime les couleurs, la plage dynamique, la définition, et tout ça même sans faire beaucoup de retouches » dit-il, bien qu’admettant qu’« en ce moment, je suis plus sur le numérique, mais honnêtement c’est juste le coût. Si l’argentique était plus abordable, j’en ferais plus, c’est certain ».

Le poids de l’image
Outre les qualités esthétiques de l’argentique, c’est peut-être justement dans les limitations qu’elle impose que se trouve une partie de son intérêt aujourd’hui. « L’argentique m’a permis de développer un sens en photographie où je donne vraiment de la valeur à la photo que je vais prendre avant même de l’avoir prise, et donc je prends pas en photo n’importe quoi. » Habitude imposée par le coût donc, mais qui se préser ve même lorsqu’on retourne vers les outils d’aujourd’hui. « Des fois ça m’arrive, même en digital, de porter mon appareil à mon œil et me dire « ah c’est pas si intéressant que ça » et de ne pas prendre la photo, même si rien ne m’en empêche ». En plus du coût, le processus argentique se différencie du digital en imposant une étape supplémentaire entre la prise de vue et la création d’une image : le développement.

Une gratification différée
Cette impossibilité devoir immédiatement le résultat oblige un apprentissage des aspects techniques de la photographie (gestion de la lumière, du cadre, du flou) qui est facile à négliger, surtout en tant qu’amateur·ice, lorsqu’on peut simplement essayer et refaire en numérique. Le développement consiste en deux étapes : d’abord, la pellicule est, dans l’obscurité totale, soumise à un traitement chimique qui fait apparaître en négatif les images que l’on a prises. Ensuite, ces négatifs sont soit scannés, soit reproduits sur du papier photographique. Cette reproduction, largement automatique et en partie numérique pour les pellicules couleur, est un procédé souvent entièrement manuel pour le noir et blanc et se passe en chambre noire, à la lumière rouge.

L’esthétique du film connaît un retour à la mode considérable.

Elle constitue pour nombre de photographes une grande partie du plaisir qu’il·elle·s ont à faire de l’argentique. Gabriel Delarageaz, qui a travaillé dans un laboratoire qui proposait ce genre de tirages à ses client·e·s, se souvient avec joie de cet aspect-là de son travail. « Même si on le faisait très rarement pour des clients, car c’était cher, les jours de congé je le faisais pour moi, j’en ai fait pleins, pas autant que j’aurais voulu ! »

Photo : © Patrick Hirling

Il est bon à savoir, pour les lecteur·ice·s intéressé·e·s par la photographie en noir et blanc, que développer ses photos soi-même est une pratique relativement accessible, du moins l’étape de développement des pellicules, et qu’il existe un grand nombre de ressources sur internet à ce sujet. De plus, le club photo de l’EPFL propose des formations et met à disposition de ses membres un laboratoire équipé. Pourquoi donc la photographie argentique séduit-elle toujours? D’un côté, elle permet de créer des images dont l’apparence a aujourd’hui acquis quelque chose d’intemporel et dont certaines qualités visuelles sont difficiles à imiter. D’un autre, la lenteur et le coût du processus qui mène de l’appui sur le déclencheur à la naissance d’une image lui confèrent une unicité et rendent compte de façon sensible que pouvoir capturer et préserver un instant, devenu presque une évidence, a bien encore quelque chose de miraculeux.