Les Krafft, coeurs en éruption
VOLCANOLOGIE • Katia et Maurice Krafft ont marqué l’histoire de la volcanologie. Leurs expéditions filmées ont capturé des images spectaculaires de volcans en éruption, offrant un regard inédit sur ces forces de la nature
Originaires d’Alsace, Katia, géochimiste née en 1946, et Maurice, géologue né en 1942, se sont rencontrés à l’université. Ayant grandi tous deux dans les décombres de l’Alsace de l’après-guerre, le monde leur paraissait dangereux et incertain. Ils se sont alors tous deux réfugiés dans le monde des mystères naturels. Leur amour s’est très rapidement développé autour de leur passion ardente partagée. Avec peu de moyens, ils sont partis en expédition sur de nombreux volcans actifs, parfois même en éruption. Face à ces explosions de lave, de roches et de gaz, ils étaient à la fois fascinés et confrontés à leur humble condition, se sentant minuscules devant la puissance de la nature. Conscients – mais indifférents – des risques, ces passionnés n’hésitaient pas à s’approcher au plus près des cratères, la curiosité scientifique étant plus forte que la peur. Les amoureux préféraient une vie intense et courte à une existence longue et monotone.
Volcans et vies en éruption
Les Krafft ont dédié leur vie à ces géants en feu, faisant le choix de ne pas avoir d’enfants pour se consacrer entièrement à leur passion. Leur approche des volcans s’éloignait des classifications traditionnelles, chacun de ces géants étant unique à leurs yeux. Ils ont œuvré pour le progrès scientifique tout en capturant des images spectaculaires, laissant un héritage visuel qui durerait au-delà de leur existence. Les deux scientifiques se complétaient de par leur spécialisation dans des domaines différents. Une grande partie de leur travail a contribué à rendre les systèmes de prévention des éruptions plus efficaces. Maurice rêvait d’un monde où les volcans ne tueraient plus.
Un refuge face à la désillusion
Attiré par la puissance brute de la nature, le couple trouvait dans cette fascination un refuge face à leur désillusion envers l’humanité. Alors qu’à leurs yeux le monde semblait dysfonctionnel, les volcans représentaient une force plus grande que les préoccupations humaines, un défi mystérieux qu’ils cherchaient à comprendre. Finalement, leur fascination pour les volcans les mena jusqu’à la mort. Le 3 juin 1991, les Krafft per- dirent la vie, côte à côte, lors de l’éruption du mont Unzen, au Japon. Le documentaire «Fire of love», réa- lisé par Sara Dosa, rend hommage à leur travail et met en avant que leur amour explosif s’est à jamais fossilisé dans les roches de l’histoire de la volcanologie.
Sarah Pfitzmann