Les “Sephora kids”: l’innocence de la Génération Alpha menacée?  

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TENDANCE VIRALE • Phénomène viral sur les réseaux sociaux, les « Sephora kids » prennent de plus en plus d’ampleur. Ces pré-adolescentes, âgées entre 7 et 14 ans, adoptent des routines beauté qui imitent celles des adultes. Quels risques se cachent derrière l’écran?  

Produits inadaptés aux jeunes  

Influencées par les réseaux sociaux, un nombre croissant de jeunes filles, appelées “Sephora Kids”, ne cessent de gagner en importance. Des crèmes et sérums aux bronzers et anticernes, ces pré-adolescentes mettent en péril leur santé physique et mentale en utilisant des produits cosmétiques devenus viraux sur les réseaux sociaux. Ce phénomène touche en particulier la Génération Alpha, qui regroupe les enfants nés à partir de 2010, et qui grandissent dans un monde saturé par les nouvelles technologies et les plateformes sociales. Cette génération est la première à être entièrement immergée dans un univers numérique, ce qui accentue leur exposition aux influences virtuelles, y compris dans les domaines de la beauté. Cela soulève de sérieuses inquiétudes liées aux dangers physiques, psychologiques et sociaux et interpellent de nombreux experts et parents.  

Les enfants participant à cette tendance utilisent souvent des produits non adaptés à leur peau sensible et encore en développement. Selon les dermatologues, l’utilisation de produits destinés aux adultes peut nuire à l’équilibre de leur peau et entraîner des réactions telles que des allergies, des irritations, de l’acné et de l’eczéma. Certaines substances, comme les parabènes ou les phtalates, peuvent même provoquer des déséquilibres hormonaux. À un âge où la peau est encore fragile, l’exposition répétée aux produits chimiques présents dans le maquillage et dans les produits de skincare, ou soin de visage, peut également perturber la production naturelle d’huiles de la peau, entraînant des problèmes dermatologiques à long terme.  

Le danger des réseaux sociaux pour les enfants  

À la racine de cette polémique se trouvent les réseaux sociaux tels que TikTok et Instagram, qui amplifient ce phénomène et le rendent plus visible. Ces plateformes promeuvent les vidéos qui influencent les enfants auprès de leurs utilisateur·ices, notamment les jeunes filles, permettant à ces contenus de cumuler des millions de vues.  

En plus des contenus créés par les adultes qui influencent les enfants, il y a toute une pléthore de vidéos postées par les Sephora kids elles-mêmes, tels que des tutoriels, des routines beauté ou encore des hauls. Cela pose des risques liés au bien-être mental, comme le besoin de validation à travers les likes, les commentaires et le nombre de vues, ce qui peut entraîner des problèmes d’estime de soi. L’obsession pour l’apparence et la comparaison constante avec d’autres personnes, encouragée par ces réseaux, engendrent également un danger au développement de ces jeunes. Il incombe aux réseaux sociaux de réguler de manière plus stricte l’âge de leurs utilisateur·ices, voire d’augmenter la limite d’âge. 

Un marketing ciblé?  

Le succès de ce phénomène n’est pas le fruit du hasard. En effet, le marketing des marques de cosmétiques a évolué au fil des années, et tend à cibler des utilisateur·ices de plus en plus jeunes, et ce notamment grâce aux réseaux sociaux et aux influenceur·ices. Les Sephora kids sont le reflet direct de cette stratégie, où les enfants sont encouragés à participer aux tendances beauté pour se sentir intégrés à leur génération. Les emballages aux couleurs vives, les publicités et les collaborations avec des influenceur·ices célèbres créent une image glamour et désirable du maquillage et des soins de visage.  

Il est également important de souligner l’aspect genré de ce phénomène. Les pratiques de beauté sont presque exclusivement encouragées chez les filles, leur inculquant très tôt l’idée que leur valeur repose en grande partie sur leur apparence physique. Cette pression esthétique, axée sur la féminité, contribue à renforcer les stéréotypes de genre dès le plus jeune âge, ce qui nuit énormément à leur santé mentale.  

Mesures prises par les magasins  

Face à cette tendance grandissante, certaines marques et plateformes ont commencé à prendre des mesures. Sephora, par exemple, a renforcé son discours sur la responsabilité concernant la consommation de produits cosmétiques, en encourageant un usage modéré et raisonné chez les plus jeunes. Cependant, ces efforts demeurent souvent insuffisants face à la viralité de la tendance.  

D’autre part, Apothek Hjärtat, une chaîne de pharmacie suédoise, interdit la vente de certains produits cosmétiques aux jeunes de moins de 15 ans. Ce genre d’initiatives sont plus efficaces en matière de prévention et ont le potentiel de mettre fin à ce phénomène si les grands magasins tels que Sephora font de même.  

Les jeunes face aux dangers des apparences 

Le phénomène des « Sephora Kids » est symptomatique de l’ère numérique actuelle. Si les enfants cherchent à imiter les adultes pour s’amuser ou appartenir à un groupe, les conséquences de cette tendance vont bien au-delà du simple jeu. Entre les dangers physiques liés aux produits cosmétiques, les effets psychologiques des réseaux sociaux et le pouvoir du marketing ciblé, il devient urgent de réfléchir à la place que nous accordons à la beauté dans l’enfance et aux mesures à prendre pour protéger les jeunes de la Génération Alpha, déjà victimes d’un monde d’apparences.  

Auyoni Sen-Akmal  

  

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